Un rêve de trattoria
La Trattoria di Montemagno est cachée dans un village des Monts Pisans, au bout d’une route qui à force de rétrécir s’arrête tout à fait. Elle n’est référencée dans aucun guide. Son chef est une chef. On y mange une cuisine de haute saveur pour 15 euros. Comment est-ce possible ?
On est en Italie, les gars !
En Italie, derrière les fourneaux, ils ont aussi des Michel-Ange (Massimo Bottura) et des Savonarole (le siège du mouvement slow food est à 30 km). Mais il est commun de trouver au restaurant une cuisine de ménage, rurale, familiale, traditionnelle, bonhomme, de bonne femme. (Trouver sans chercher.) Une cuisine qui a été balayée, de ce côté-ci des Alpes, par la prise de pouvoir des hommes, d’Escoffier à Gault&Millau, et par notre maladie nationale, le raffinement. Nous n’avons plus d’artisans et trop d’artistes, notre climat ne produisant que des chefs aspirant aux *** ou des clients Metro. On aimerait pourtant que puissent exister dans le même espace-temps Pierre Passard et signora Daniella (les noms sont fictifs).
Bref, à la trattoria di Montemagno, vous ne trouverez pas de plats d’auteur. Zéro créativité ! Aucun produit d’exception. Juste de la pasta bien saucée, des légumes même pas anciens bien traités et quelques spécialités locales. Les plats que votre grand-mère italienne vous mitonnait pendant vos étés en Toscane, bande de veinards !
Soit, pour être moins théorique :
- farfalle con triglia e limone : aux rougets et citron. Du velours, à prendre en primo puis en secondo !
- trenette al pesto avvantaggiate : au pesto, pommes de terre et haricots verts. Plutôt pour les travailleurs de force.
- zupetta di polpo e totani : entre la soupe et le ragout de poulpes et calmars, sauce tomate et pain mouillé. Une spécialité de la côte livournaise.
- bracioline fritte in salsa : côtelettes à la sauce tomate. Pas la même sauce tomate que celle de la zupetta hein ! Du concentré de tomates, sans trop d’acidité, enrobant le gras d’une fine côtelette de porc…
- et aussi du lapin aux olives, une caponata d’exception, des courgettes à la menthe.
Bon, côté dessert, Conticini n’est pas à la manœuvre (eh oui, le blogueur est contradictoire), mais la maison se défend bien :
- pêche rôtie au four et crème, avec son verre de vin de noix
- pana cotta à la menthe
- semi-freddo chocolat ou fruits des bois
- cantuccini et son verre de vin doux (aleatico)
Accueil tout en douceur, service tout en efficacité. La clientèle, essentiellement italienne, apprécie des deux mains l’axe programmatique de la maison et les plats défilent comme à la parade. L’été, on dîne sur la piazza. On prendrait bien demi-pension, si ce n’était le vin de la maison, vraiment éprouvant et sans alternative (pas de carte des vins). Dit Daniella, la prochaine fois, on pourra venir avec notre bouteille ?
Alors ? Venir plusieurs fois pour goûter toute la carte. Le Pisan ayant un palais pointu, la trattoria est connue et visitée : il faut réserver.
♥♥♥ / €
Trattoria di Montemagno
Montemagno di Calci, Pisa